Après un Ethers de bonne facture, paru chez le non moins excellent label Baskaru, Emmanuel Mieville nous revient cette fois chez Cronica, autre structure d’excellence en ce qui concerne les musiques électroniques expérimentales. Mieville poursuit ici son exploration du monde à travers sa musique et les sons qu’il a pu collecter. Avec cet album c’est l’Asie et le monde bouddhiste que Mieville met en lumière. Du Népal à Hong Kong en passant par le Japon et Taïwan, ce disque apparaît comme une mosaïque sonore qui fait sens quand on parvient à s’imprégner pleinement de ses textures. Si Tanit Astarté, le premier morceau, est inspiré par Antonin Artaud et son livre Heliogabale, il coïncide, dans sa forme et dans l’esprit, aux trois autres compositions. Dans chacun d’entre eux, il y a quelque chose de mystique, proche du rêve éveillé où les retournements de situations et les divagations sont nombreuses. On ne sait trop si l’homme est revenu transformé de ses voyages mais à travers ses disques il tente clairement de nous faire changer notre perception de ce monde. Parce qu’il est multiple et qu’il ne saurait être formaté, ce même monde offre autant de visages que de mode de penser. Ce disque d’Emmanuel Mieville ne saurait être exhaustif dans ce que l’Asie a à montrer mais, indéniablement, il ouvre quelques portes. Juryo ne saurait qu’un disque introspectif de plus. De par son dynamisme, son sens du mouvement et sa narration onirique, la musique d’Emmanuel Mieville évite d’être démonstrative. Elle montre également que le field recordings a encore des marges de manœuvre et qu’il peut toujours construire des paysages originaux. En un sens, même si elle continue de s’adresser à un auditoire averti, elle parvient à renouveler le genre avec une certaine souplesse. Certes, Mieville n’est pas un révolutionnaire mais il apporte une évolution dans son utilisation de la matière et dans sa manière à lui donner un sens avec le vivant. On ne peut plus intéressant donc. Fabien
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