“A Compressed History of Everything Ever Recorded, Vol. 1” reviewed by Etherreal

Qui se cache derrière Autodigest, on ne le saura probablement jamais.

On ne sait d’ailleurs pas s’il s’agit du pseudo d’un artiste, d’un groupe, ou plus simplement d’un projet, même si cette dernière hypothèse nous sembleêtre la plus probable. Mais cela fait partie du concept : les notes du livret expliquent qu’Autodigest n’a pas de date de création, ni de référence géographique. On s’aventurera juste à situer ce projet au Portugal puisque c’est sur le label Cronica que sort cette mystérieuse galette.

On vous le dit tout de suite, le titre de cet album, apparemment le premier d’une série, est à prendre au sens propre. En effet ces morceaux ont été composés en traitant des sons enregistrés, en compressant le temps pour réduire par exemple un tube pop à une fraction de seconde qui n’est alors plus qu’un bruit qui ne nous évoque rien. Le meilleur exemple est le dernier morceau au titre parfaitement explicite : 60 hours in 1 second, interprété live à Stockholm en mai 2002.

Heureusement, l’idée de départ ne sert généralement qu’à créer des sonorités inhabituelles qui sont ensuite utilisées dans un véritable travail de composition. Sur Compression 1 par exemple, chaque bruit, très bref, est soumis à une reverb qui prolonge le son par un long souffle qui nous rapproche plus de l’ambient que de la noise music. Compression 4 utilise le même procédé, sans la reverb, plongeant l’auditeur dans un silence inquiétant entre chaque séquence bruitiste d’une fraction de seconde. Le genre de travail que l’on avait déjà rencontré avec Koji Asano qui en faisait un album complet.

En réalité, on n’est pas vraiment en terrain inconnu. Chuintement, fourmillement de bleeps aigus, magma granuleux, bruits de machines, micro samples électroniques nous rappellent parfois des artistes signés chez Mego.

On est alors surpris quand on entend une séquence parlée, même si celle-ci est noyée dans un souffle comme s’il s’agissait d’un pilote de chasse, quand des notes nous font penser à un orchestre en train se s’accorder, ou quand une mélodie tire-larme, noyée dans les parasites à la manière de Fennesz, se fera entendre.

On se demandera ce qu’il se passe quand un morceau nous semble trop calme, se prolongeant pendant près d’un quart d’heure, jusqu’à ce que l’on ait l’impression que des sons ont été étirés. En fait tout est normal, il s’agit de la piste 8 intitulée Expansion, sur laquelle le traitement inverse auraété effectué, créant ainsi une pièce ambient. On regrettera juste les derniers titres aux compositions moins fouillées, alignant les sonorités micro-électroniques sans véritable construction. A réserver peut-être aux amateurs de musiques bruitistes.

Cet album est toutefois une belle réussite: un travail intéressant qui mêle expérimentation et plaisir d’écoute. Le genre d’album qui, s’il pouvait être décompressé, devrait être envoyé dans l’espace en espérant qu’une intelligence extra-terrestre prenne connaissance de l’histoire de la musique terrienne.

Fabrice Allard

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