“Product 01” reviewed by Etherreal

Après l’album conceptuel d’Autodigest dont on parlait récemment, voici une autre sortie de l’exigeant label portugais Cronica, avec ce premier CD d’une série cherchant à confronter les univers sonores de deux artistes.

Pour ce premier numéro, on trouve l’australien Sumugan Sivanesan à la démarche très expérimentale, avec une recherche sur le son et la combinaison de différentes sources sonores, puis Duran Vazquez qui fait subir des traitements extrêmes à des morceaux, à la base, techno.

La musique de Sumugan Sivanesan est absolument sans concession, et ne cherche vraisemblablement pas à faire passer la moins émotion. Le but de sa démarche est plutôt de travailler sur la perception, et de cherches des formes musical au sein même de bruits. Mais au long des huit premiers morceaux de cet album on traverse tout de même divers univers. Plutôt électro-bruitiste avec des basses vrombissantes, des sifflements suraigus (Mono is the New Black), des variations, des ondulations sur des souffles grésillants (Life Imitates Art), avec parfois un joli travail de composition, d’agencement de sonorités originales (Sinus). Toujours bruitiste mais moins abstrait, One Note Solo est un impressionnant magma sonore concassé accompagné d’une faible note produisant un étrange mélange ambient-noise. Très intéressant mais on préférera quand l’australien mélange ses bruits électroniques à des field recordings pour de subtiles pièces ambient: souffles et cris de mouettes (Steam), ou ronronnements et bruits de circulation sur Fold.

Avec Duran Vazquez on est un peu plus en terrain connu, mais surtout il sait apporter une dimension émotionnelle à ses morceaux. Mis à part 2 titres qui restent relativement abstrait, le reste est un subtile dosage dans lequel on retrouve juste ce qu’il faut d’éléments rythmiques ou mélodique pour ne pas être complètement laissé à l’abandon. Dark-ambient à base de souffle et bruit sourd de machine qui rappelle les battements d’un coeur (Monsanto, East St. Louis, Illinois), approche similaire avec des éléments qui se mettent en place de façon précise pour un Virus Simplicity dans un style electronica rythmique, ou texture ambient qui tourne en boucle, créant du même coup un rythme (Sueño Eléctrico Controlado). Et quand il utilise des mélodies c’est avec la même réussite. Celle de Death Simplicity tient sur 4 notes répétitives, inquiétantes et brouillées par des voix distordues et hachées. Plus subtil, Rochas No Ceo est peut-être le plus beau morceau de l’album, lorsqu’une magnifique et sombre mélodie s’extirpe d’un lointain magma granuleux et d’entre-chocs.

Si l’idée de faire cohabiter deux artistes sur un même album n’a finalement guère plus d’intérêt que chez d’autres labels, les choix opérés par Cronica devraient faire la différence. On a le temps d’apprécier le travail de chacun, et les deux artistes ont une même approche, une même exigence, ce qui rend l’album parfaitement cohérent. Pour finir, Duran Vasquez est pour nous une véritable révélation.

Fabrice Allard

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